mardi 10 avril 2012

BADBADNOTGOOD

BADBADNOTGOOD Jazz

Critique CD

La note discographique du deuxième album de BADBADNOTGOOD, intitulé BBNG2, se lit ainsi: "Aucune des personnes impliquées dans la création de cet album n'avait plus de 21 ans. Cet album fut enregistré en une session de 10 heures." Voilà, le ton est donné! Le trio de jeunes musiciens torontois en a rajouté lors d'une entrevue accordée au magazine alternatif Now, dont ils faisaient la une, en pourfendant l'académisme des institutions scolaires dont ils sont eux-mêmes fraîchement émoulus. En résumé, ils accusent les écoles de jazz d'enseigner Coltrane et Parker, poussant les jeunes à devenir d'excellents techniciens mais qui manquent cruellement de créativité, selon le pianiste Matt Tavares du groupe BBNG. Et vlan, le pavé est lancé dans la mare!

Il n'en fallait pas plus pour que les traditionalistes montent au créneau pour défendre l'institution du jazz. Peter Hum du Ottawa Citizen y est allé d'une longue diatribe en faveur de la tradition. Dans le camp opposé, Anthony Dean-Harris de NextBop est carrément monté à la défense de BBNG. Bien entendu, les journalistes ont tiré à boulets rouge sur tout ce qui bouge, de Brad Mehldau à Robert Glasper en passant par The Bad Plus et Esperanza Spalding. Et la discussion au sujet de la valeur des reprises de tubes rock, hip hop et dubstep et de toutes ces cultures qui viennent enrichir le langage jazz pour l'amener à un autre niveau, ou le rabaisser, c'est selon. Au bout du compte, est-ce que la musique est bonne ou non? C'est à vous d'en juger. Ici, une reprise de She de Frank Ocean avec Tyler, The Creator.


On a critiqué le groupe BBNG sur la profondeur de sa musique, sur le fait que certains de ses vidéos cumulent plus de 300,000 visionnements (pour un groupe jazz pratiquement inconnu, ça tient du miracle!), sur le fait que le groupe a été endossé par le producteur Gilles Peterson, qu'on associe à la mouvance Acid Jazz. On peut dire tout ce qu'on veut, mais une chose est certaine. Les jeunes musiciens de BBNG savent créer le buzz. Peu importe s'ils doivent porter une tête de cochon en spectacle ou lancer une discussion incendiaire, ils manipulent très bien les médias sociaux, lacune de plusieurs musiciens jazz plus "traditionnels" qui peinent encore aujourd'hui à présenter un simple site web décent.

Finalement, la question n'est pas de savoir si les jeunes de BBNG sont à la hauteur des Vijay Iyer, Robert Glasper et compagnie. Il faut plutôt se poser la question suivante: "Est-ce que le groupe peut amener des jeunes de moins de 25 ans à un concert jazz?" Écoutez leur reprise de Limit To Your Love de l'album BBNG2, en streaming ici sur le site de BBNG. La réponse, elle est là. Pour ceux que la chose intéresse, il s'agit d'une chanson de Feist qui fut reprise en dubstep par James Blake sur son album éponyme de 2010. Hey! Si vous êtes comme la moyenne des amateurs de jazz d'aujourd'hui, il est fort probable que lorsque vous aviez 20 ans, vous vous rouliez dans la boue à Woodstock en absorbant des substances illicites (ou vous en rêviez)! Donc, si les jeunes de BBNG s'amusent en faisant du jazz avec une tête de cochon sur la tête et attirent des jeunes vers le jazz, je dis BRAVO!

Tous les albums de BBNG sont disponibles en téléchargement gratuit sur leur site, selon le modèle éprouvé. On peut faire un don via Paypal.

Si vous lisez Jazz Frisson dans un agrégateur de nouvelles et voulez écouter tout le contenu musical que je propose, cliquez ici sur Jazz Frisson.

Un billet de Jazz Frisson, votre blogue de jazz francophone.